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L'odyssée d'un Colibri
11 juillet 2020

10 juillet

Le départ est fixé à 8h : plus tôt on arrivera, moins il risque d’y avoir de monde au mouillage. Comme ce n’est pas encore le week-end, nous espérons être relativement tranquilles et profiter d’au moins une journée dans un coin un peu plus naturel et sauvage que La Valette, avant de retraverser vers la Sicile.

Avant de partir, on profite de la présence d'un camion citerne en bout de ponton pour refaire le plein de gazole et discutons un brin avec le skipper d'un bateau de charter, Patrick, sympa mais d'une façon un peu trop artificielle et "tutoyante", à l'anglo-saxonne, comme si on était des vieux potes.

On trouve peu de vent en sortant de la rade, c’est encore au moteur ou en navigation mixte voile/moteur qu’on longe la côte maltaise.

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Un semi-rigide gris du genre militaire nous approche à vive allure, émet un coup de sirène et manœuvre pour nous aborder. M’attendant à un contrôle de routine, je sors les documents du bateau dans le cockpit. En fait, ils ne viennent pas nous contrôler mais nous demander de nous dérouter pour contourner une zone d’exercice de tirs (firing practice range) effectivement signalée sur la carte, zone autorisée à la navigation, mais où on « should procede with caution ». Nous obtempérons en ajoutant 20-30 degrés à notre cap, même si de nombreux autres bateaux, surtout ceux à moteur, ne semblent pas concernés par l’avertissement. 10 minutes après, nous entendons effectivement des rafales de tirs et repérons la portion de littoral où ça canarde à tout va. Ça se calme après quelques minutes. Nous reprenons progressivement notre cap sans prendre de balle perdue.

A l’approche de l’île de Gozo, petite sœur de Malte, on se fait rattraper par beaucoup de monde : les vedettes à moteur évidemment, mais aussi par des voiliers qui bourinent au moteur à plus de 6 nœuds. Chez nous, on tient à ménager notre moteur et nous ne dépassons que rarement les 2000 tours. Les Maltais (comme les Italiens) ne semblent pas avoir les mêmes scrupules.

Approche de l'île de Gozo:

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Nous avons repéré deux anses voisines où nous pourrions mouiller. On approche de la première, a priori un peu plus grande, mais constatons vite qu’il y a déjà beaucoup trop de monde à notre goût et qu’il va être compliqué d’y faire notre trou. Nous prolongeons donc notre route pour aller inspecter la seconde crique : c’est encore assez encombré, mais jouable. Nous mouillons 25 m de chaîne sur 6 m de fond. Le cadre de ce mouillage, pourtant présenté comme un des plus jolis du secteur, nous déçoit un peu : d’un côté de la petite plage qu’on  voit au fond, une rive est occupée par un hôtel anciennement désaffecté mais en plein travaux de réhabilitation. L’autre rive, rocheuse et très aride, est certes plus agréable à l’œil, mais elle est investie par une ligne de bateaux qui ont porté une amarre à terre. Quant au plan d’eau de ce mouillage, il est de plus en plus envahi de monde : quelques voiliers et d’innombrables bateaux à moteur de toutes sortes. Ils sont tellement nombreux que les plus petits d’entre eux mouillent en ligne en s’amarrant à couple sur plusieurs rangées, donc exactement comme dans un port, en moins confortable. Comme nous nous sommes placés vers l’entrée de l’anse, nous ne sommes embêtés par ces petits bateaux que lorsqu’ils passent en nous frôlant et en nous envoyant leur sillage. Le niveau sonore général est très élevé et désagréable : cris des baigneurs, l’inévitable tsoum-tsoum musical de l’abruti égoïste de service, feulements de propulseurs d’étrave, vrombissements de moteurs… Dans ce pays de riches frimeurs, on croise ici de nombreux bateaux surmotorisés, du genre « Cigarette » qui font un boucan infernal. Pour le côté nature sauvage, on repassera…

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Cet environnement peu enchanteur (selon nous ; les Maltais ont l’air d’aimer ça) ne nous empêche quand même pas de nous baigner, mais le plaisir est un peu gâché par la nécessité de surveiller les incessants va-et-vient. Une grosse vedette à moteur d’environ 15 mètres vient mouiller beaucoup trop près de nous. Il est évident que nous allons nous toucher ou être limites dès qu’on va éviter (tourner autour de l’ancre), d’autant que lui et nous le ferons très différemment.

Pour toutes ces raisons, la question de l’intérêt de rester là se pose assez vite. Nous repartirions bien dès maintenant vers la Sicile. Mais on n’aurait qu’un très faible vent de NW, en plein dans la figure. Ça risquerait d’être de la navigation au moteur du début à la fin. Demain, en revanche, la météo prévoit un vent d’ouest assez soutenu (jusqu’à 18 nœuds) et promet une navigation beaucoup plus sympa au petit largue. Nous choisissons donc de prendre notre mal en patience. On est très soulagés de voir partir enfin la grosse vedette à moteur vers 20h. En revanche, contrairement à ce que nous avions vu dans les calas surpeuplées des Baléares, les petits bateaux à moteur n’évacuent pas les lieux à la tombée de la nuit. L’un d’entre eux va continuer et même amplifier sa pollution sonore jusqu’à 23h, façon boîte de nuit. Personne ne lui gueule dessus pour lui demander de calmer le jeu, comme si c’était parfaitement normal. Avec notre pavillon étranger, je n’ose pas prendre l’initiative de le faire… et ne suis d’ailleurs pas sûr qu’il m’entende, noyé dans son propre vacarme.

En tout cas, nous ne passerons pas une seconde soirée ici dans ces conditions.

A la relecture, je réalise que je râle beaucoup depuis deux-trois jours, alors que nous ne sommes évidemment pas à plaindre et que beaucoup aimeraient être à notre place. C’est que nous nous sommes tellement imprégnés de la gentillesse familiale italienne (et plus spécialement sicilienne) que cette ambiance jet-set maltaise ne peut que nous décevoir. Certaines incivilités, en mer comme à terre, ont le don de me hérisser le poil. De plus, après avoir profité d’une tranquillité exceptionnelle au mois de juin, hors-saison, le temps a passé et nous voilà le 10 juillet : l’affluence de la saison commence à apparaître, particulièrement sensible ici à Malte (plus forte densité de population d’Europe) et ce n’est pas le plus agréable. Vivement une belle navigation qui nous mènera vers des horizons plus conformes à nos aspirations.

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