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L'odyssée d'un Colibri
4 juillet 2020

Du 3 au 4 juillet

J’ai pris du retard ces derniers jours dans la rédaction de ce journal de bord. Le bateau n’a pourtant pas bougé d’un iota. Aucune navigation à raconter, mais nos journées ont été si bien remplies par nos pérégrinations terrestres que j’ai eu un peu la flemme d’écrire en rentrant le soir. D’aucuns que je ne nommerai pas commencent à crier au scandale contre le retard de mes publications et j’en suis très heureux. Alors je m'arme de courage et je m’y remets avant qu'Alexandre Keller ne me fasse un procès, même si la dimension maritime de ce blog passe provisoirement aux oubliettes.

3 juillet : journée sur Syracuse.

Le matin, nous allons découvrir le marché et y faire quelques emplettes. Il mérite sa bonne réputation en occupant une seule longue rue qui se trouve alors particulièrement animée, colorée et bruyante : les vendeurs rivalisent d’ardeur pour héler le chaland, faire la réclame de leurs produits et se chambrer entre eux. Les étals de fruits, de légumes, d’olives, d’épices et de poissons font vraiment envie et leurs prix sont très attractifs. Par exemple, le kilo de tomates se vend à 1€. Ce ne sont pas les tomates pleines d’eau des productions intensives espagnoles. Elles sont bien plus charnues et goûteuses. (Il y a sûrement une bonne raison, mais je ne sais pas pourquoi les grossistes français ne travaillent pas plus avec les producteurs italiens alors que le prix d’achat de base semble être comparable, voire plus avantageux qu’en Espagne). Il en va de même pour presque tout le reste. Nous rentrons chargés d’abricots, de pêches, de mirabelles, d’olives, de haricots, d’une bonite et de tranches d’espadon (12€ le kilo).

Ma foie, voilà une belle bonite pour un prix dérisoire:

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Nous avons deux objectifs à réaliser cet après-midi : trouver une voiture à louer pour les trois prochains jours et visiter les vestiges archéologiques de Syracuse.

Pour la location de voiture, ça se règle dans l’agence Avis toute proche. Après avoir un peu négocié (en comparant avec les offres proposées en ligne), nous nous mettons d’accord pour une C3 Cactus à un tarif acceptable. Nous l’avons à disposition immédiatement –ce qui nous permettra de partir de bonne heure demain matin- mais il faut encore prendre le temps d’aller faire le plein d’essence avec une dame de l’agence et de trouver une place de parking gratuite.

Voilà. Maintenant qu’on a une belle voiture toute neuve, c’est à pied (et en boitant pour la matrone) que nous traversons la moitié de la ville pour atteindre son grand parc archéologique. Oui, bon, on pensait que c’était moins loin. La visite de ce parc est très agréable. Pénétrer dans cette antique carrière devenue un grand espace de verdure luxuriante est une bouffée d’oxygène salutaire dans cette ville attachante, mais tellement animée et bruyante ! Disséminées parmi les bosquets émergent des curiosités géologiques en calcaire: des falaises, des grottes, une sorte de gigantesque menhir naturel et, surtout, l’Orecchio di Dionisio : une énorme grotte où la résonnance acoustique est exceptionnelle, pour le plus grand bonheur des enfants (et leplus grand malheur de mes oreilles au bout de cinq minutes à subir leurs cris et applaudissements amplifiés).

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Côté archéologie, le site présente surtout trois monuments importants : le plus grand théâtre grec de Sicile, en assez bon état, que fréquentèrent quelques personnalités de seconde zone comme Eschyle, Pindare, Euripide et Platon. J’ai eu cependant du mal à verser ma petite larme d’émotion : trop difficile d’imaginer ces illustres barbus se balader en toge autour de la scène modernisée pour un prochain spectacle, les caisses de matériel sono, les projecteurs, et la rumeur persistante de la ville à l’arrière-plan.

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On jette un coup d’œil à l’immense autel de Hiéron II (200m de long) qu’on pourrait qualifier d’abattoir géant puisque les Grecs y sacrifiaient environ 250 bœufs par jour, dont la viande était boulottée par la population, laissant généreusement les entrailles aux dieux.

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A 17h58, nous nous présentons in extremis devant la dernière partie du site, l’anfiteatro romano, qui ferme à 18h. D’ailleurs, les grilles sont déjà fermées. Le gardien les rouvre exprès pour nous, et nous pouvons admirer les beaux restes de cet amphithéâtre taillé dans le rocher.

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Nous redescendons ensuite vers le port en faisant une halte dans un petit supermarché pour acheter quelques jus de fruits dont nous faisons une consommation effarante.

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4 juillet: l'Etna et Taormina.

Réveil à 6h30 pour Brigitte et moi, un peu plus tard pour Héloïse, un peu plus tard pour Ulysse et encore un peu plus tard pour Perrine. Finalement, départ peu avant 8h : c’était vraiment pas la peine qu’on se lève si tôt. Le programme de la journée est pourtant ambitieux : il s’agit de voir l’Etna au plus près possible (mais sans trop savoir comment), puis d’aller découvrir le célèbre site de Taormina (devant lequel on est passé en navigation il y a 3 jours, mais qui ne dispose pas de port de plaisance correct).

Brigitte a semblé préférer me laisser conduire. La prise en main de cette petite voiture se fait sans problème, mais la circulation automobile sicilienne demande un petit temps d’adaptation. Le marquage au sol et les règles de priorité sont généralement inexistantes. Les feux rouges, presque toujours en panne, servent surtout à égayer les rues. On voit de nombreux panneaux de limitation de vitesse, mais personne ne semble s’en soucier. Pour autant, le trafic est (très) dynamique et fluide, les conducteurs faisant d’abord preuve de bon sens et d’un certain respect d’autrui. Il est certes déconcertant de voir un poids-lourd dépasser une caravane en franchissant une ligne blanche en pleine montée, mais finalement, ça passe toujours et on s’habitue bien à cette façon de conduire. Je m’insère au mieux dans le flot, sans gêner personne, et tout se passe bien. Il me semblerait en revanche assez dangereux de respecter scrupuleusement les limitations de vitesse dans la mesure où absolument tout le monde les dépasse très largement.

Mon caprice d’hier pour acheter une bonne vieille carte routière en papier est resté inassouvi, soi-disant parce que je ne suis qu’un vieux ringard, tout ça. C’est donc à l’aide du seul GPS que nous nous dirigeons vers l’Etna. Le trajet nous semble peu cohérent, ne suivant que de courts tronçons de route et passant par plusieurs zones industrielles. Quand nous finissons par comprendre qu’il est paramétré pour éviter les autostradas, nous sommes presqu’arrivés à destination.

Après avoir suivi une belle route en lacets, nous atteignons le rifugio Sapienza à 1900 m d’altitude. De refuge, l’endroit n’a que le nom : il y a là plusieurs hôtels, des restaurants, des boutiques de souvenirs et un départ de funiculaire. Le sommet de l’Etna, à 3340 m, nous regarde encore de très haut et nous domine de sa masse imposante. Après quelques hésitations, on décide de s’en approcher un peu en prenant le téléphérique jusqu’à 2500 m, puis un drôle de minibus tout-terrain qui nous dépose à 2900 m après avoir slalomé entre les anciennes coulées de lave dans un paysage lunaire.

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A cette hauteur, il fait tout à coup beaucoup plus frais et nous enfilons nos polaires. Un guide est là pour nous piloter sur quelques centaines de mètres et nous donner, ainsi qu’à huit autres personnes, quelques informations assez sommaires mais suffisantes sur la vie du volcan : ses 300 cratères, les dernières fractures et tremblements de terre, les effondrements et différentes éruptions. Nous voyons maintenant de beaucoup plus près le grand cratère du sommet et son panache de fumée (composé de vapeur, de gaz divers et de cendres). Comme sur Vulcano, nous sommes heureux que les enfants aient l’occasion de voir et de sentir littéralement la terre vivre sous leurs pieds. Pour se réchauffer les mains, il suffit de se baisser et de les enfouir sous un peu de terre sableuse. Hormis l’intérêt que nous portons au volcan lui-même, nous admirons aussi le magnifique panorama qui s’offre à nos yeux.

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La descente en minibus est aussi chaotique et amusante que la montée, et celle en funiculaire sans surprise. Cette approche de l’Etna en gros touristes n’a évidemment aucun intérêt sportif et j’ai ce petit sentiment frustrant du sommet non mérité, mais c’est quand même une belle expérience. De toute façon, la véritable ascension jusqu’au cratère ne s’improvise pas mais réclame une grosse organisation avec guide, autorisations et matériel ; d’autre part, avec le genou en vrac de Brigitte et les capacités limitées de Perrine en randonnée, cette solution pour côtoyer un moment le plus grand volcan d’Europe était la seule envisageable.

La petite famille commence à avoir les crocs, mais les restos à touristes du départ du téléphérique ne me tentent pas du tout. Nous proposons aux enfants de reprendre la voiture en direction de Taormina et de nous arrêter dans le premier village venu, dès qu’on passera devant un quelconque marchand de panini. Ça ne va finalement pas être si simple : on ne traverse que des bleds où tout ce qui pourrait ressembler à un bistrot ou à une boulangerie est fermé. Nous finissons par échouer dans un restaurant familial à Giarre, tout prêt de Taormina, alors que l’après-midi est déjà bien avancé. Nous n’y commandons qu’un plat chacun, mais quel plat ! Excellent et copieux, juste ce qu’il nous faut.

Comme le conseille notre guide touristique, nous nous garons peu après en bas de la vieille ville de Taormina où nous conduit un funiculaire. (Il est décidément beaucoup question de téléphérique et de funiculaire dans ce journal de bord maritime). Ce vieux centre-ville est mignon comme tout. Nous en traversons une partie pour accéder au fameux théâtre antique. Presque plus que le monument lui-même, le site choisi pour le construire retient l’attention. Depuis les gradins, une vue exceptionnelle sur la mer et l’Etna s’étend derrière la scène. En l’occurrence, nous voyons mieux la mer que l’Etna qui s’est progressivement noyé dans des nuages orageux depuis ce matin, mais c’est très beau quand même. Héloïse et Perrine, quant à elles, se souviendront probablement moins de la vue que d’un groupe de musiciens qui répète sur un côté de la scène. Nous devons presque nous fâcher pour enfin les décider à « décrocher » de la musique et pouvoir quitter le site. Au passage, nous repérons un joli mouillage au nord de la ville, mais très peu abrité du sud à l’est.

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La route du retour vers Syracuse (environ 150 km de plus, au moins 300 km au total aujourd’hui) se passe sans problème mais on est contents de retrouver notre bateau puis notre couchette après cette bonne journée.

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Commentaires
P
Superbes et bien organisées vos découvertes; bravo! surtout que prévoir un trajet à la voile est quasi impossible. nous le savons bien.<br /> <br /> A part tous les sites ( intéressants par leur mélange de styles) conduire en Sicile ne s'oublie pas. Ce n'était pas une impression de vieux. Ne jamais respecter un stop au risque de se faire rentrer dedans, oublier le code, et...admirer la virtuosité des siciliens qui finalement s'en sortent toujours en se faufilant partout; jamais vu un accrochage la-bas. Mais en fait, conduite ressemblant assez à celle de Frédéric, non?<br /> <br /> Bonnes routes, puis bon vent à nouveau. M.
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