30 juin

Elle nous plait bien, cette escale vulcanienne de Porto du Levante, sa minuscule « marina Blu » familiale, sa vue sur le volcan et sa plage rigolote avec son eau chaude et ses bu-bulles. Nous hésitons à rester là une journée de plus. Mais Brigitte repère un mouillage qui semble sympa aussi de l’autre côté de l’île. Il est peu abrité et, comme d’habitude, difficile à prendre à cause de ses fonds particuliers, mais la météo prévoit des conditions calmes : nous larguons notre bouée et repartons pour une nouvelle micro-étape.

Le temps de contourner la partie sud de Vulcano (1/2h), nous atteignons le mouillage situé entre les pointes del Asino et dei Porci. Il n’y a qu’un seul autre voilier, à pavillon US. Nous avons donc de la place pour faire notre manœuvre proprement, par 6 m de fond, avec une solide marche arrière pour enfouir l’ancre dans le gros sable du fond : on sent bien le coup de frein et le rappel, pas de problème, on est croché. Le voilier américain s’en va assez vite après notre arrivée, nous laissant seuls sur ce chouette mouillage.

Grosse séance de baignade habituelle en prenant garde aux quelques méduses qui se laissent dériver un peu partout.

Vers midi, un autre voilier s’approche et vient mouiller assez près de Colibri en nous faisant de grands saluts. Les filles reconnaissent l’équipage du bateau italien qui était amarré de l'autre côté du ponton à Lipari : un voilier de charter avec des gens qui regardaient souvent en souriant l’animation  qui régnait à notre bord. Mais leur ancre ne tient pas. Deux heures plus tard, ils dérapent, commencent à dériver vers le large, remontent leur mouillage et partent au moteur à toute vitesse vers la côte sicilienne en face.

La maîtresse de Perrine nous avait laissé un gentil message vocal hier pour évoquer les compétences scolaires de la miss afin de choisir au mieux sa classe et son enseignant ou enseignante l'année prochaine. Après avoir contacté le directeur de l'école sur son portable et eu une discussion sympa avec lui, elle me rappelle aussitôt. La conversation, fréquemment interrompue à cause de la mauvaise connexion là où nous sommes, a quelque chose de surréaliste. Je suis en maillot de bain, accoudé à la bôme sur le roof pour essayer de capter au mieux, répétant une phrase sur deux parce que ça ne marche pas bien, en train de faire le point sur le niveau de Perrine dans les différents domaines de compétence et sur les copines avec lesquels il serait ou non judicieux qu'elle se retrouve au CE1. Perrine elle-même semble dans l'instant être très loin de tout ça...

Un peu plus tard, je vois dériver à environ 300m de nous une grosse bouée blanche en forme de cygne. Branle-bas de combat ! En deux minutes, on installe le moteur hors-bord sur l’annexe et Ulysse et moi fonçons à plein régime récupérer cette prise de mer indispensable. Mais voilà que nous repérons un gros catamaran qui fonce lui aussi à pleine vitesse à la poursuite de la bouée avec force cris et gestes. Nous arrivons les premiers et nous emparons du trésor. Mais comme on n’est pas des chiens et qu’on a compris que cette bouée leur appartenait avant de leur échapper, nous nous approchons de leur bord et leur rendons la bouée au grand soulagement d’une petite fille. Ils nous remercient en anglais comme si on leur remettait le Saint Graal et nous regagnons notre bord, satisfaits de notre héroïque mission de sauvetage.

En début de soirée, nous allons prendre un verre sur la terrasse de la petite plage privée de la crique. On est les seuls clients et l’accueil est très souriant. Nous profitons de la vue : Colibri sagement mouillé devant la côte sicilienne, avec son mât juste dans l’axe de l’Etna qui se détache au fond sur l’horizon.